A propos de l’extradition vers la Libye de Baghdadi Ali al-Mahmoudi

 

Dans les années 80 et 90, beaucoup de militants d’organisations politiques d’opposition en Tunisie sont passés de la sphère politique à celle des droits humains. Ce passage, qui prenait acte de l’inefficacité de la lutte pour des changements politiques profonds de la société, privilégiait le combat pour les droits de l’Homme, la dénonciation des atteintes aux libertés, etc.

Moncef Marzouki a fait le chemin inverse, c’est un choix que personne ne peut critiquer. Il a affirmé que, dans ses nouvelles responsabilités, il défendrait en toute occasion les droits humains, ce qui est tout à son honneur. Il est bien placé, de par son expérience, pour savoir qu’on ne peut faire confiance aux promesses que font les régimes qui tolèrent la torture, quand ils ne l’ordonnent pas.

Le Président, contrairement au défenseur des droits de l’homme, fait confiance aux promesses du nouveau régime libyen : en dépit de toutes les coutumes internationales, il aurait donné son aval « sous conditions », à l’extradition vers la Lybie de l’ancien premier ministre de Khaddafi, après des tractations secrètes, menées dans un grand restaurant de Paris, par un représentant du ministre de la Justice. Comment peut-on accepter que des marchandages entre Etats (à combien est évaluée une vie ?) soient avalisés par un ancien président de la Ligue des droits de l’Homme ? Se serait-il converti à la raison d’Etat ?

Et l’Assemblée Constituante, dont le Président a affirmé à de nombreuses reprises son attachement aux droits humains, n’est-il pas dans ses responsabilités de contrôler l’action du gouvernement ? Le cas posé ici est de ceux qui engagent l’honneur du pays. Le refus  de la décision d’extradition de Baghdadi Ali al-Mahmoudi peut être une occasion de prouver que les élus n’ont pas donné un chèque en blanc au gouvernement.

Mais peut-être ces élus qui oublient leurs promesses veulent-ils donner raison à Chirac  qui disait : « Les promesses n’engagent que ceux qui y croient. »

publiè par Gilbert Naccache sur Facebook le vendredi 25 mai 2012