Gouvernement… La jeunesse tunisienne a raison…

 

Nous recevons et publions volontiers cette contribution de Faouzi Mahbouli à propos de la récente condamnation du rappeur Weld el 15.

Faouzi Mahbouli, est un juriste et homme d’affaires tunisien. Il est notamment connu pour sa dissidence contre le régime du président Zine el-Abidine Ben Ali. Il est contraint à l’exil en janvier 2008, suite à la tentative d’ extorsion de son projet Bricorama Tunisie.

Il dénonce alors les pratiques mafieuses du régime Ben Ali et de sa famille élargie, mais aussi la torture, et les assassinats politiques en publiant de nombreux articles sur Facebook, son blog politique “La Tunisie de Dina” et ReadWriteWeb, l’un des blogs les plus influents au monde en matière de web 2.0.« Sur Facebook, ce sont au maximum une dizaine de groupes qui ont osé aborder des sujets politiques […] mais c’est Real Tunisia News qui est allé le plus loin dans la publication de tous les articles concernant les atteintes aux droits de l’homme, arrestations arbitraires, procès inéquitables… mais aussi ceux évoquant les nombreuses turpitudes de l’insatiable famille du général président à vie. Avec près de 700 membres, ce groupe qui a réussi à réunir tous les leaders de l’opposition tunisienne et de nombreuses personnalités, journalistes, etc. de différents pays, commençait sérieusement a gêner « le sommet du régime »10. »Ayant obtenu l’asile politique en France, Mahbouli est victime le 22 octobre 2009 d’une tentative d’assassinat1, trois jours avant l’élection présidentielle tunisienne, qui donne lieu à une enquête de la brigade criminelle. Quelques semaines auparavant, il avait dénoncé la réélection attendue de Ben Ali comme une « mascarade ».

 Le régime Ben Ali le fait condamner pour des prétendus délits financiers et demande son extradition le 20 décembre 2010, près d’une semaine après le déclenchement d’une révolte dans la région de Sidi Bouzid, la demande est acceptée par le Quai d’Orsay le 22 décembre. Arrêté, et après avoir passé 20 heures en garde à vue, il est maintenu sous contrôle judiciaire jusqu’à l’annulation par le gouvernement issu de la révolution tunisienne, en juin 2011, du mandat d’arrêt international lancé contre lui.

Aujourd’ hui Faouzi Mahbouli vit en Tunisie et continue son combat en franc-tireur, sans épargner un camp politique, même s’ il dénonce en particulier contre les tenants de l’ ancien régime encore impunis et l’ appui de la France à ces derniers.

 

Gouvernement… La jeunesse tunisienne a raison…

En dépit du dépassement prévisible de la durée du mandat de l’ Assemblée Nationale Constituante que j’ avais évoqué dans un article intitulé :

“Pas de limitation formelle de la durée du mandat de l’ Assemblée Nationale Constituante…C’ est si bon le pouvoir…”.

J’ ai toujours défendu la légitimité démocratique de la Troïka issue des premières élections libres de notre pays, et l’ idée que seules les urnes pourraient changer le gouvernement.

Cette opinion politique ne m’ a jamais empêché d’ exprimer publiquement ou directement ma critique des injustices qui subsistent encore prés de 3 ans après la “révolution” (terme tellement galvaudé que je le mets depuis un moment déjà entre guillemets).

Mon intime conviction est que de nombreux incidents sont montés en épingle pour détourner l’ attention de l’ opinion publique de la nouvelle prédation économique que subit notre pays….

Et ce qui est surprenant, c’ est que ça marche…

A titre d’ exemple, la polémique suscitée par les non évènements des femen de Soros, a totalement éclipsé la question cruciale de l’ emprunt auprès du FMI, et cela après qu’ il ait été considéré inutile de procéder à un audit de la dette illégitime qui a profité pour l’ essentiel aux tenants impunis du régime déchu…

Lors d’ une réunion au sein du palais du gouvernement à laquelle une délégation d’ entrepreneurs tunisiens de la région de Sfax m’ avait convié pour défendre la cause d’ un de leurs amis en détention depuis plus de deux ans (M. Khaled Kobbi) , j’ ai vivement critiqué le maintien d’ une justice à deux vitesses qui n’ a jamais été assainie, et qui par conséquent ne saurait revendiquer une indépendance absolue…Du moins pour le moment…

Comme je ne connaissais pas personnellement l’ homme d’ affaires en question, j’ ai évoqué le cas de M. Sami Fehri en indiquant que sans me prononcer sur l’ imputabilité des faits qui pouvaient lui être reprochés, j’ avais la certitude absolue qu’ il ne pouvait être le sommet de la corruption en Tunisie, et que ce sentiment était très largement partagé par l’ opinion publique.

C’ est d’ ailleurs l’ argument massue pour sa libération…

Mais son avocat et ses prétendus amis préfèrent occulter cette vérité et continuent a arborer benoitement son portrait et diffuser des stupides + 300…En guise de décompte de ses jours de détention….

Budgets publicitaires provenant des sommets de la corruption impunis obligent…

J’ ai enfin indiqué que ce gouvernement avait l’ obligation absolue de mettre rapidement un terme aux injustices les plus flagrantes pour que la jeunesse tunisienne ne perde pas à nouveau l’ espoir et bascule vers le pire.

L’ indignation de certains rappeurs tunisiens est saine, elle est même libératrice des frustrations d’ une jeunesse tunisienne qui ne voit toujours rien venir, et ce n’ est certainement pas en mettant en détention des rappeurs qu’ une justice qui ferait bien de faire son propre procès pourra résoudre les problèmes.

 

L’ indépendance d’ une justice dont la corruption n’ a pas été résolue et qui continue a absoudre les criminels et les pillards tandis qu’ elle condamne lourdement des tagueurs et des rappeurs ne peut être invoquée par le gouvernement, et personne n’ ignore que dans bien des cas, et pour des raisons bien moins reluisantes, ce dernier a su imposer ses vues…

 

NB: Je n’ approuve pas l’ insulte envers les corps constitués et l’ autorité de l’ Etat, parce qu’ à titre personnel, j’ ai toujours préféré adresser mes critiques aux décisionnaires, par ailleurs, je n’ ignore pas que même dans des démocraties occidentales des rappeurs ont été poursuivis pour les mêmes causes.

Mais je maintiens qu’ en l’ état actuel des choses, l’ indulgence envers notre jeunesse doit être de mise, en attendant des exemples concrets d’ une justice intègre et impartiale et d’ un gouvernement respectueux des aspirations légitimes de la population.